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Santino Wars
24 décembre 2010

French Touch

La Jeune Garde française du wargame

panoramix

Beaucoup les connaissent sur les fora, par les revues ou les clubs de jeux. Wargamers expérimentés, ils ont franchi récemment le difficile cap de l'édition, et ce avec un succès remarqué. Gros plan sur quelques uns de ces créateurs de talent ou, plus exactement, sur leurs oeuvres premières. Et, pour les retardataires, quelques bonnes raisons de s'offrir un beau cadeau de Noël...


Race for Berlin, par François Xavier Euzet ( jeu du magazine Battles #4 ).

BattlesCover

Le sujet du jeu est la ruée finale sur Berlin des armées soviétiques de Koniev et Joukov. L'échelle est opérationnelle, la carte à zone, et le niveau de complexité va de simple à modéré selon l'expérience des joueurs. Quelques bonnes raisons d'y jouer :

- des graphismes attrayants ( bien que le style de la carte puisse surprendre ) signés O. Revenu

- une approche originale et bien pensée de la bataille : les joueurs prennent chacun en charge l'un des maréchaux russes ainsi que les troupes allemandes faisant face à l'adversaire. L'objectif étant de retarder l'autre au maximum afin d'être le premier à entrer dans la capitale du Reich. Ainsi les deux joueurs sont-ils vraiment impliqués dans la partie, avec une réelle possibilité de victoire, là où un joueur allemand aurait bien du mal à trouver sa motivation. Autre point fort : l'avancée aléatoire des troupes américaines à l'Ouest, créant une tension supplémentaire et reproduisant l'angoisse de la Stavka de voir les Occidentaux lui ravir sa prise. Lorsque l'on met tout ceci bout à bout, on comprend que le titre du jeu n'est certes pas usurpé.

- le reste du système, peut-être moins remarquable, est élégant et fluide. On sent les playtests intensifs derrière.

RfB a été fort bien accueilli par la communauté, comme en témoignent les retours sur Boardgamegeek et les fora. De quoi encourager l'auteur - nous l'espérons - à persévérer dans le domaine de la création.

 


Liberty Roads, par Yves Le Quellec et Nicolas Rident ( Hexasim )

liberty_roads

Si le sujet n'est pas nouveau - la croisade finale des Alliés pour libérer l'Europe en 1944-45 est un thème cher à nos amis anglo-saxons - il bénéficie d'un traitement passionné qui n'est certes pas passé inaperçu à sa sortie ( et même avant ). Le jeu est stratégique, le traitement des unités au niveau de la division, et la grande carte s'étend de la pointe du Finistère au coeur de l'Allemagne nazie. Là encore, quelques bonnes raisons de découvrir Liberty Roads : 

- le matériel est beau et coloré ; j'ai personnellement tiqué un moment sur les visuels proposés en avant-première, notamment du fait d'un usage pas toujours abouti de l'outil vectoriel. Une illusion d'optique à dire vrai : ramenés à leur échelle véritable et posés sur un plateau de jeu fort réussi et détaillé, les pions ont fière allure.

- le système, qui parvient à simuler les grandes caractéristiques de cette campagne sans sombrer dans la complexité. Les solutions sont toujours intelligentes et abordables : combats, ravitaillement et renforts ( une donnée cruciale s'il en est ), soutiens, difficultés de coopération interalliées, forteresses et kampfgrüppe de fortune allemands, rien n'est négligé.

- la liberté d'action du joueur allié, qui peut tenter ses débarquements où il l'entend ( le Jour J donne d'ailleurs lieu à des règles spécifiques ). Si toutes les options ne se valent certainement pas, selon le degré de fortification des côtes ou la proximité d'un grand port essentiel à la logistique alliée, c'est un des grands plaisirs du jeu que de pouvoir donner à la campagne une tournure vraiment différente des événements historiques.

Il sera sans doute surprenant de dire après tout cela que LR ne m'a pas vraiment plu. A dire vrai, j'apprécie peu les wargames où le sort d'un des protagonistes est scellé ( ici l'Allemand ), et ce même si des conditions de victoire bien réfléchies permettent une victoire ludique. Mais de cela, ni les concepteurs ni le jeu ne peuvent évidemment être tenus responsables. LR est objectivement une vraie réussite ( il fut d'ailleurs nominé au CSR Awards ), même s'il n'est pas exactement la première réalisation de N. Rident, déjà auteur avec Thomas Pouchin d'un Marne 1918 : Friedensturm ( Hexasim ). Si je ne le présente pas, c'est que je n'y ai pas joué, mais ce premier titre a lui aussi récolté un accueil chaleureux. Par contre, je ne manquerai pas d'essayer Into the Bastards, jeu du Battles Magazine #7, sur la bataille de chars d'Amiens en 1918 ! 

 

 

 

 

Kawanakajima, par François Vander Meulen ( Hexasim )

kanawa

Jeu tactique sur une bataille de l'ère Sengoku Jidai ( l'affrontement des chefs de guerre japonais pour le titre de Shogun au XVI° s. ), Kawanakakija reproduit l'une des nombreuses batailles livrées en ce lieu par les clans Takeda et Uesugi. Quelques bonnes raisons de plébisciter une création hors-normes :   

- graphiquement,tout est beau, sauf les pions d'unités. Eux sont tout simplement magnifiques, parmi les plus beaux pions de wargame qu'il m'ai été donné de voir. Je suis moins fan de certaines marqueurs, mais l'unité d'ensemble du matériel est un sans fautes.

- le système de commandement des clans est la grande réussite du système, chaque clan composé de quelques pions suivant une attitude souvent restrictive ( attaque, défense, mouvement ou poursuite ). Le général en chef peut changer ces ordres, mais aussi pousser en avant certains clans avec ses points de commandement, leur permettant une double activation dans un tour.  Dans tous les cas, l'exécution de ses volontés sera retardée en fonction de la distance qui le sépare du clan récepteur. Des plans de bataille correspondant aux formations historiquement adoptés par les armées de l'époque renforcent encore l'impression de se sentir à la place du général en chef. Ici, l'omnipotence du joueur sur ses troupes n'a pas cours, et le risque de perte de contrôle est permanent.

- l'activation par tirage de marqueurs, système simple mais efficace et ajoutant une dose de chaos bienvenue dans l'ordre d'action des clans.

- la simplicité du système, qui évacue au maximum la micro-gestion : pas d'orientation des unités, représentation simple des teppos ( premières armes à feu ), résolution des combats sur une table unique. Cette table n'est certes pas d'abord évident, mais on comprend assez vite et l'usage, tout comme on se fait à son côté un peu trop aléatoire par moments.

- cerise sur le gâteau : des règles pour jouer un assaut de forteresse dans le cadre d'une variante de la bataille historique.

On l'aura peut-être compris, ce jeu est mon préféré. S'il fallait le qualifier d'un seul mot, ce serait "immersif". En effet, des graphismes au système de jeu, tout ambitionne à nous mettre dans l'ambiance, et plus encore dans la peau des Daimyos du XVI° s. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que le pari est largement réussi. Kawanakajima est comme nombre de haikus si chers à la culture japonaise : une magnifique épure.

FVM ne compte d'ailleurs pas s'arrêter en si bon chemin : un quadrigame devrait paraître chez Hexasim en 2011, pour le plus grand bonheur des joueurs qui ont épuisé la première bataille et ses options.

 

Conclusion

J'aurais évidemment pu étendre le panel à d'autres "nouveaux venus", ainsi Laurent Guenette pour son jeu solitaire A week in Hell ( Battles #3 ). Ou Lionel Liron, graphiste déjà maintes fois sollicité et en cours de finalisation d'un jeu sur les guerres indiennes. J'aurais aussi pu parler de nos amis canadiens francophones, qui semblent tout sauf inactifs en termes de créativité, et sans doute d'autres encore que je ne connais pas. Si le wargame français a de belles heures devant lui, c'est aussi largement grâce à deux éditeurs dynamiques permettant aux nouveau talents de s'exprimer : Hexasim et Battles Magazine ( bientôt renforcé par Nuts ! Publishing ). Hexasim a un catalogue de parutions bien fourni pour 2011, tandis que Battles continue son bonhomme de chemin de seule revue française de stature internationale. O. Revenu, son maître d'oeuvre, nous a clairement affiché ses motivations au delà de sa passion pour le jeu : atteindre l'ensemble de la communauté de wargame à travers l'usage de l'anglais, mais aussi promouvoir la création française en lui donnant une passerelle de choix vers cette même communauté. Entre présentations des oeuvres suscitées - et certainement de manière plus éloquente que mes quelques réflexions - et publication de wargames inédits, la revue a déjà fait beaucoup en ce sens. Après tout, que serait notre French Touch s'il n'y avait personne avec qui la partager ?

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